Brazil de Terry Gilliam

Je dois avouer quelque chose…
Je ne connais pas les Monty Pythons.

Enfin ils ne me sont pas totalement inconnus non plus: j’en ai déjà entendu parler et leurs films Life of Brian et Holy Grail sont tellement cultes que je n’ai pu passer à côté de leur gigantesque réputation.

Mais le fait est que les Monty Pythons c’est une grosse lacune de ma culture. Alors quand je me suis lancé dans Brazil (le premier film que je voyais réalisé par Terry Gilliam), j’avais une très vague idée à quoi je devais m’attendre.

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(Puis bon: en voyant ça je n’étais pas déçu)

C’est difficile de parler de ce film parce que sur beaucoup de points il est à la fois compliqué et simple.

La dystopie créée ici est plutôt simple: c’est une reprise de 1984 de George Orwell. Dans Brazil un régime totalitaire contrôle ce que doivent penser les gens à travers les médias. La principale différence avec 1984 c’est qu’au lieu de critiquer les figures politiques des régimes totalitaires, le film critique la bureaucratie. Après il y’a de nombreuses autres différences: 1984 décrit un régime communiste, tandis que Brazil décrit un régime très stigmatisé entre les riches et les pauvres. 1984 critique la surutilisation de la surveillance, à la place Brazil critique la violence dont peut faire preuve un régime aussi policier (et ce dès le début du film).

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(Scène cauchemardesque; de l’arrestation de « Buttle » qui trouve
beaucoup d’échos avec ce qu’il se passe encore aujourd’hui)

Rien qu’avec ce postulat Brazil est un film compliqué parce qu’il aborde beaucoup de critiques sociétales, mais en même temps ça reste une histoire qu’on a déjà beaucoup vu: celle d’un système politique complétement foireux face auquel le personnage principal va s’opposer.
En rajoutant à cela: le côté un poil psychédélique de ce que nous montre Gilliam, une couche d’onirisme qui viendra parsemer tout le film, il y’a de quoi perdre le spectateur.

Bref: je n’ai toujours pas parlé de la vraie trame narrative du film où l’on suit Samuel (Joli prénom) Lowry, qui travaille dans le Ministère de l’Information du gouvernement totalitaire. Il est totalement aliéné par son travail de bureaucrate et rêve d’une fille avec qui il s’évade dans un autre monde.

Le film commence donc sur une faute de frappe dans une machine à écrire, qui mènera un homme (« Buttle », un prolétaire lambda) être enlevé de chez lui, et exécuté par mégarde à la place d’un terroriste dangereux (« Tuttle » chauffagiste à temps partiel, mais avant tout terroriste).
C’est là qu’intervient Sam Lowry, qui essaiera de réparer les dégâts de cette erreur administrative meurtrière, et qui se rendra compte que la fille qu’il voit dans ses rêves existe bel et bien et qu’elle serait peut être liée à toute cette histoire de terrorisme qui parasite le pays depuis un petit moment.

Et puis à cette histoire va se rattacher beaucoup de sous intrigues, un poil inutiles, mais qui sont là pour étayer le propos du film et pour rajouter du comique. Comme les scènes entre Sam et sa mère, mais aussi celles avec les chauffagistes ahurissants dans leur bétise.

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(Le plus gros taquet mît à la bourgeoisie de tout le film.
Gilliam ne se privera pas d’attaquer les bourgeois à travers la mère de Sam.)

Parce que forcément: Terry Gilliam qui sort d’une des troupes de comiques les plus célèbres et célébrées de son temps va mettre de l’humour dans son film. Il y’en a de toute sorte: du comique de situation, en passant par les dialogues, à des choses beaucoup plus simples comme du comique au niveau du corps et du mouvement.

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(Un des moments les plus fendards du film, c’est bien celui là.
En plus d’être drôle c’est quelque chose de bien cynique.)

Dernier point que j’aimerai aborder et qui me tient tout particulièrement à coeur: Jonathan Pryce.
Ce n’est pas un acteur que je connais énormément, je l’ai vu dans Game of Thrones. Et après avoir fait un tour sur sa page IMDb je me rends compte qu’il jouait dans Demain ne meurt jamais, un des James Bond que j’ai le plus vu parce que c’était le seul que j’avais en DVD.

Bref, tout ça pour dire que Jonathan Pryce, même si je ne l’ai pratiquement jamais vu autre part, dans ce film il brille de mille feux. Il a une bonhommie qui colle parfaitement au rôle. On s’identifie très vite à lui, et on a envie de voir son personnage évoluer et ce même si le film nous perd à cause de sa complexité.

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(Mattez-moi cette bouille: vous avez pas envie de lui faire
confiance vous ?)

Brazil c’est donc une dystopie qui critique la bourgeoisie par moment, mais qui est surtout tourné contre la bureaucratie, et la violence de l’état.
C’est aussi une comédie, avec certains moments tragiques, qui est servie par une mise en scène et des acteurs grandioses.
C’est une œuvre profonde à laquelle je ne pourrais jamais assez rendre honneur dans un texte écrit aussi précipitamment.
Ça vaut vraiment le coup de s’intéresser à Brazil parce que c’est dense, intelligent, drôle: un très très très bon film en somme.

Lost In Translation ou « Comment j’ai retrouvé la motivation »

Ces 4 derniers mois ont été compliqués pour moi. Ceux qui me connaissent et qui me suivent l’ont compris.
J’étais totalement perdu (je le suis encore un peu d’ailleurs) dans mes propres pensées, j’étais prisonnier de mes propres démons.
Comme les deux personnages du film dont il est question aujourd’hui.

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(On va parler du film… Enfin en quelque sorte)

Lost In Translation raconte l’histoire de Bob et Charlotte. Un acteur déchu et une étudiante tout droit sortie d’une fac de philo, qui font tous les deux face à une crise existentielle profonde pendant leur court séjour à Tokyo.

Le film sera basiquement une histoire d’amour entre ces deux personnages, si différents mais se ressemblants tellement intérieurement.
Mais voir Lost In Translation comme un pur objet de romantisme comme un Before Sunrise ça serait faire une faute énorme. C’est avant tout un film comique, très grinçant: qui utilise la barrière de la langue pour mettre en exergue l’absurdité du monde et l’impossibilité de communiquer.

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(Passage absolument culte, typique de l’humour du film)

L’utilisation du comique ici est très particulière parce qu’elle n’est pas une fin en soit. Coppola ne fait pas rire juste pour faire rire, les situations comiques, les décalages sont là pour montrer de un:
-La perte de repères de nos personnages (Comme le titre l’indique)
Mais surtout de deux:
-Leur point de vue sur la vie. Ce sont des personnages déprimés qui ne voient plus que de l’absurdité partout.

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(Il n’y a pas que les personnages Japonais qui créent du décalage
de l’absurde et du vide: il y’a aussi ce personnage d’actrice
Hollywoodienne au nom totalement oubliable)

C’est pour ça que je me suis senti profondément connecté au film: parce que comme ses personnages, je ne suis plus sûr que quoi que ce soit ait de sens dans la vie en général.
Et le film solutionne ce problème de l’absurdité.
Bob et Charlotte finissent par s’y retrouver, et mettre de l’ordre dans leur vie.

Alors que les deux personnages sont en manque total de repères, une fois qu’ils se rencontrent tout paraît plus doux. Ce qui paraît être une façon pour la réalisatrice de dire: « L’amour solutionne tout vos problèmes, même vos questions existentielles les plus profondes, il suffit juste de trouver l’amour » mais selon moi il y’a quelque chose d’un peu plus profond que ça.

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(Je pense à la scène du karaoké: où les deux protagonistes passent au delà
de l’absurde et du ridicule et s’assument complétement)

Le fait est que: rien ne change profondément avant et après la rencontre de nos deux protagonistes. Leur environnement n’est pas devenu plus ou moins sensé. Ce que dit le film (je pense) c’est qu’il faut embrasser l’absurdité que le monde a à nous proposer; avec un regard bienveillant. Parfois il nous faudra quelqu’un, quelque chose pour voir que: ce qui compte ce n’est pas le grand vide profond que représente tout le non sens qu’est la vie, mais bien ce que l’on fait de ce grand vide. Rien n’a vraiment de sens, et alors ?
Ce n’est pas pour autant qu’on ne doit ne plus rien faire, se laisser aller. Tant que cette personne, cette chose, a un tant soit peu de sens, ne serait-ce qu’une seconde; tout aura du sens pour l’éternité.

Alors voilà: ce film m’a fait tout simplement réaliser qu’il faut prendre les choses comme elles sont, qu’il ne faut pas se laisser décourager au moindre obstacle, mais que surtout: il faut se concentrer sur les choses qu’on aime.
Il faut cultiver la motivation, et l’inspiration: même si ce sont deux choses ondulantes il faut les faire grandir plutôt que de les laisser dépérir.

Bref, il est encore un peu tôt affirmer que ce film m’a fait faire un déclic, étant donné que je ne l’ai vu qu’hier. Mais ce que je peux vous dire avec certitude c’est que: ce film fait du bien.
Il est optimiste, beau, drôle; il me redonne la pêche.

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(Scène anodine, mais qui a su m’hypnotiser par ses images
mais surtout grâce à sa musique: merci My Bloody Valentine)

Je n’ai pas tant parlé du film en soit, je ne l’ai pas tant analysé que ça non plus, malgré le fait que ce soit un film profond qui mérite beaucoup d’attention. Mais c’est parce que tout ça n’était pas vraiment important.
Ce qui était vraiment important pour moi ce n’était pas toutes les considérations artistiques que j’aurai pu avoir autour du film. Ce qui est important c’est que ce film m’a fait réfléchir.
Pas de la même manière qu’un Blade Runner, un Inception, ou un Godard.
Il m’a fait réfléchir parce qu’il m’a donné une clé pour mieux appréhender ma vie et ce que je traversais en ce moment. Et même si cette sensation peut être éphémère: peu de films arrivent à faire ça.

Me And Earl And The Dying Girl de Alfonso Gomez-Rejon

Après mes deux premières critiques qui parlaient de sorties de la semaine : j’avais envie de changer un peu.
J’avais envie de vous parler d’un film que je connais bien, pour produire une critique avec beaucoup plus de consistance qu’auparavant.

Alors j’ai hésité à vous parler de The Room de Tommy Wiseau, pour lequel j’ai une grande fascination et une affection toute particulière: ce nanar m’hypnotise à chaque fois…
Malheuresement je ne me voyais pas parler de
The Room sans évoquer son processus de production chaotique et sa dimension sociale; la façon dont les fans se sont apppropriés le film.
Et ça me demandait donc un travail de documentation que je ne pouvais pas fournir en ce moment (puis j’avais la flemme surtout).


(J’ai découvert le film par cette vidéo que je vous recommande…)

J’aurais pu vous parler aussi de La La Land de Damien Chazelle. Selon moi incontestablement un des meilleurs films de l’année (si ce n’est le meilleur). Que je connais très bien, qui a une mise en scène limpide comme de l’eau de roche (donc facile à évoquer), malgré de nombreuses références très pointues, devant lesquels nous sommes nombreux à être passés.

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(La référence au Sueur Froide d’Hitchcock, pour citer une des plus évidentes)

Et j’étais en train d’écrire (avant de changer complétement d’avis) une critique sur Snake Eyes de Brian de Palma: qui est pour moi tout simplement énorme. Un scénario bien ficelé; une B.O. signée Ryūichi Sakamoto; un Nicolas Cage sublime et juste.
Bref
Snake Eyes c’est un thriller américain plutôt moraliste, mais tellement bien exécuté, avec une mise en scène et des mouvements de caméra incroyables qui font que la morale n’est pas rédhibitoire pour autant: elle paraît même logique.


(Pour rappel Sakamoto c’est surtout ça)


(Et c’est aussi ça Sakamoto)

Donc mon choix s’est porté au dernier moment sur Me and Earl and The Dying Girl de Alfonso Gomez-Rejon (Renommé maladroitement en France This Is Not A Love Story) que j’ai revu très récemment.
Un Teen Movie qui allie habilement plusieurs mises en abyme, comédie, et drame.

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(Parlons du film donc)

Le film commence comme le plus banal des Teen Movie, où le personnage principal Greg, raconte son histoire en analepse (le mot intelligent pour flashback).
Il énumère les différents groupes qui existent dans le lycée, nous parle de son seul ami : Earl, avec qui il fait des contrefaçons de vieux films d’auteurs.
S
auf que l’élément modificateur de l’intrigue intervient : une connaissance de Greg ; Rachel est leucémique.
La mère de Greg force son fils à aller voir Rachel, et c’est ainsi qu’une histoire d’amitié naît entre la mourante et le jeune cinéphile.

Je voudrais commencer en parlant du scénario. Je souhaite m’en dégager le plus possible parce que le film est rudement bien écrit et que je ne veux pas trop en dévoiler pour ne pas vous gâcher le film si vous vous décidez à le voir.
Le film est très drôle. Notre horizon d’attente serait que le film soit chiant, et triste parce qu’il parle de cancer.
Mais pas du tout ; la majorité des échanges du film sont comiques, et ils font toujours mouche.


(Je vous renvoie à cette scène très drôle et qui n’en dévoile pas trop)

La façon dont les personnages s’échangent leurs vannes, m’a un peu fait penser aux films de Kevin Smith. Je ne sais pas si ça vient des acteurs ou de l’écriture mais il y a un vrai échange entre les personnages. Ça vient et ça repart comme une balle de ping-pong (Comparaison foireuse oui, je sais).

Alors évidemment le film n’échappe à des moments « tire larmes », on est quand même dans une œuvre qui parle du rapport à la maladie, au malade, à la mort, etc.
Mais ces moments plus tristes sont toujours écrits avec justesse, pas forcément avec subtilité, mais avec toujours de la justesse.
Puis la partie « drame » du film intervient surtout après que beaucoup de comique soit passé; donc on a appris à aimer les personnages dans la première heure du film, et on est toujours dans cet élan de la comédie, qui vient donc adoucir le drame.

Le film est aussi très bien rythmé (ce qui est compliqué quand on essaie de dépeindre une année scolaire entière), surtout à l’ouverture/Premier Acte où ça va très vite.
Mais il prend quand même son temps à partir du deuxième acte, pour poser ses personnages, les faire parler de leurs problèmes, et les faire rire.
Il y a aussi quelques montages très bons qui font accélérer le rythme du film, mais le tempo ne s’emballe pas pour autant.
Alors on est face à une œuvre qui est à la fois posée dans beaucoup de scènes, et qui accélère génialement dans d’autres.

Bref : j’ai assez parlé du scénario (sans trop en parler non plus).
Ce que j’aimerais aborder maintenant ce sont les différentes mises en abyme du film, qui sont vraiment fortes.
Je vous l’ai déjà dit : le récit est une analepse.
C’est-à-dire que la première scène du film, nous montre Greg en train d’écrire l’histoire qu’il va nous raconter en tant que narrateur du film.


(La première scène dont il est question)

La voix off de Greg interviendra tout le long du film, pour jouer avec notre perception de l’histoire : même si cette mise en abyme n’est pas plus poussée que celle que j’aborderai juste après, elle est très intéressante.
Greg, en tant que narrateur, se joue de nous. Il y a une sorte d’ironie dramatique inversée qui se crée où Greg est au courant de toute l’histoire, mais nous spectateurs, sommes au courant de rien ; alors il en profite pour nous manipuler.
Cette situation dramatique est géniale et je l’ai rarement vue exploitée au cinéma.

Puis l’autre mise en abyme beaucoup plus présente c’est celle des parodies et reprises de vieux films d’auteurs.
Je vous ai dit plus tôt que Greg, avec son meilleur ami Earl, s’amusent à contrefaire des films d’auteurs.
Ce qui nous donne le droit à des titres de films parodiés plutôt cocasses comme : Grumpy Culs de Sacs pour Mean Streets, ou encore The 400 Bros pour Les 400 Coups (The 400 Blows en Anglais).

Cette mise en abyme met en place un jeu cinéphilique intéressant : qui permet à ceux qui ne connaissent pas ces films de les découvrir, et à ceux qui les connaissent de s’investir encore plus dans le film.

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(Voilà: il faut avoir les références, mais quand on les a c’est plutôt marrant…)

Au bout d’un moment on demandera à Greg et à Earl de faire un « vrai film » pour Rachel.
Alors la mise en abyme déviera complètement du côté cinéphilique pour montrer ce qu’est la production d’un film, les problèmes qu’on rencontre quand on essaie de concevoir un bon film.
Enfin bon : la réflexion sur la production n’est qu’effleurée dans le film, pas poussée réellement.
Ce qui est dommage, mais en même temps le film ne fait qu’une heure quarante-cinq, et il aborde déjà beaucoup d’autres choses.

Et puisque le film fait beaucoup d’emprunts au vieux cinéma d’auteurs, il se permet aussi de prendre certaines musiques de grands classiques.
Par exemple on a le droit à la B.O. de Pour une poignée de dollars dans un flashback où Greg se rappelle être coursé par un chien lorsqu’il était enfant.
On a aussi le droit à la musique des 400 Coups (Oui encore), alors que les parents de Greg se disputent par rapport à l’échec scolaire de leur fils (habile référence).

J’aimerais finir en abordant la mise en scène très visuelle.
Dans chaque scène il y a une idée de cadrage intéressante. Le réalisateur utilise de la courte focale pour filmer la distance entre les personnages; des plans fixes, des plans où la caméra pivote, bouge dans tous les sens (Si vous avez regardé la scène d’intro vous comprenez de quoi je parle).
Je vais prendre quelques photogrammes de la première vraie discussion entre Greg et Rachel pour vous montrer de quoi il en retourne dans cette mise en scène.

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(Discussion entre Greg et Rachel: Champs, ils sont très éloignés. Plongée)

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(Contre champs: Rachel aussi est très éloigné. Contre plongée: c’est elle qui domine la conversation, Greg est maladroit dans cette scène.)

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(Au bout d’un certains temps Greg dira quelque chose qui touche Rachel: Alors la caméra se rapproche, moins de distance entre les personnages, notez que la caméra est de travers. Rachel est aussi déstabilisée)

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(Pareil ici: les personnages se rapprochent l’un de l’autre, donc la caméra se rapproche)

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(Dernier plan de cette scène: les deux personnages sont tous les deux dans le cadre et paraissent clairement beaucoup moins éloignés que pendant le champs/contre champs)

Bref ça ce n’est que pour une des scènes les plus flagrantes. Mais il y a aussi des tas, et des tas d’autres idées visuelles dans chaque scène.

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(Discussion entre Greg et son père: paie ton sur-cadrage)

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(Ce plan un poil fantaisiste, mais d’une beauté…)

On sent Gomez-Rejon investit dans le film et dans sa mise en scène. Chaque scène a une idée de caméra intéressante.
Il se permet même d’interrompre le film à certains moments pour insérer des séquences d’animations qui sont un peu le running gag du film.

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(Vous l’aurez vu rien que dans la scène d’intro mais il y a surtout ce pauvre petit écureuil, qui revient tout le long du film)

Me and Earl and The Dying Girl est un film léger qui a quand même de la profondeur si on se penche un peu dessus.
C’est un très bon film que je recommande à tout le monde. Qu’on soit cinéphile, ou pas, le film nous atteint parce qu’il y a beaucoup d’humanité dans les personnages, parce que toute l’équipe du film s’est investie dedans : Chef-Op, Réal, Acteurs. Parce que c’est un beau film.

Ce qui nous lie de Cédric Klapisch

Mon contact avec le cinéma de Cédric Klapisch s’est fait très récemment (il y a deux mois). J’ai commencé par L’auberge Espagnole, puis dans la même journée j’ai regardé les deux suites : Les poupées russes, et Casse tête chinois.
Ça m’arrive très rarement d’enchaîner les films en une journée, comme ça: mais j’ai développé un tel attachement aux personnages, que je voulais savoir tout de suite où la vie les menait.

Par la suite j’ai visionné Le Péril Jeune un film des années 90, retraçant l’histoire de lycéens des années 70, un peu comme un Dazed and Confused à la française.
Je recommande vivement ce film qui a très bien vieilli et qui est
assez culte chez beaucoup de trentenaires: ses personnages et ses situations sont passionnants.

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(Si ce gif vous amuse: vous devez voir ce film)

Et puis le dernier film de Klapisch que j’ai vu était Paris: film chorale de deux heures, avec un casting magnifique : Romain Duris (habitué de Klapisch), Juliette Binoche, Fabrice Luchini, François Cluzet, et Mélanie Laurent (Juste avant son passage chez Tarantino).

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(Petit morceau de l’effeuillage de Juliette Binoche. Parce que pourquoi pas ?)

Ça faisait longtemps qu’un auteur ne m’avait pas happé comme ça, alors quand j’ai vu que Ce qui nous lie allait bientôt sortir, forcément, j’étais fébrile.

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(Bon: on va vraiment parler du film maintenant)

Jean est un jeune trentenaire. Il a fait le tour du monde pendant 10 ans afin de fuir son père. Il s’est marié, s’est installé en Australie, a eu un enfant.
Alors que son couple bat de l’aile, son père tombe gravement malade, alors il décide de retourner en Bourgogne renouer les liens avec la famille de vignerons qu’il a laissée.
Il va y rester un an : le temps de produire une cuvée de vin avec sa sœur et son frère.

Chez Klapisch ce qui compte avant tout ce sont les personnages.
La mise en scène est importante: évidemment, comme dans tous les films.
Mais le travail de Klapisch est avant tout centré sur les personnages: ça passe par un travail avec les acteurs, mais aussi dans l’écriture.

Dans tous les films que j’ai vus de lui, j’ai toujours eu l’impression que c’était réel, vécu et vivant.
Il y a peu de phrases qui ne font pas vraies, ou qui semblent mal placées, mal tournées.
On a l’impression de connaître vraiment les personnages qu’on a côtoyés pendant le film, d’avoir partagé quelque chose avec eux.

Et pour Ce qui nous lie Klapisch reste dans cette continuité de travail des personnages.
Ils ont tous leurs défauts, leurs tares et pourtant on les apprécie quand même :
Jean est doux, mais très égoïste et lâche.
Son frère ; Jérémie, aussi est un poil lâche, maladroit, colérique : mais compréhensif surtout.
La sœur ; Juliette, sûrement le personnage le plus droit du film : apaisé, mais parfois strict avec ses sautes d’humeurs, qui sont contrebalancées par ses moments de vulnérabilité.

Ces trois personnages sont vulnérables, à fleur de peau : c’est peut être ça qui créé l’empathie qu’on a pour eux d’ailleurs. Ils semblent humains, parce qu’ils s’aiment, se gueulent dessus, oublient, et s’aiment à nouveau.
Les échanges qu’ils ont entre eux aussi me semblent tous justes : ils m’ont touché au bon moment, m’ont fait rire lorsqu’ils voulaient être drôles.
Le moment le plus drôle selon moi était lorsque Jean s’imagine avec Jérémie, les conversations que leur sœur a avec quelqu’un ; malgré le fait que la bande annonce montrait déjà un de ces passages c’était hilarant.

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(Ce passage: oui oui)

Le personnage d’Alicia (la femme de Jean) aussi était passionnant : très vraie, à ne pas être sûre de ce qu’elle veut de son couple, à aimer Jean mais à le repousser en même temps.
Puis elle amène de très belles scènes : comme lorsque Jean retrouve son fils après des mois ; c’était touchant, une scène où les choses passent par le non-dit, où Klapisch n’a pas besoin d’expliquer les émotions qui traversent Jean, où il se contente de montrer.
Et il y a aussi une scène d’amour entre Alicia et Jean qui est très belle, qui m’a rappelé (je ne sais pourquoi) un certain passage de L’Auberge Espagnole. Il arrive souvent à Klapisch de filmer les couples de façon intimiste et c’est le cas ici.

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(María Valverde qui est magnifique)

Ce film parle énormément de vin aussi : il est prétexte à plein de choses.
Déjà à la mise en place de l’intrigue, évidemment. Mais on aurait très bien pu raconter la même histoire sans le vin, ce qui rend au final beaucoup de moments reliés au vin superficiels, parce que pas toujours nécessaires.
Klapisch se sert aussi du vin pour parler d’amour, et de relations humaines; Jean fait d’ailleurs une comparaison pas très subtile : « L’amour c’est comme le vin : il faut du temps ».
Et surtout le côté le plus intéressant de cette évocation du vin, c’est lorsque Klapisch se sert du processus de fabrication pour parler de son propre statut d’auteur, pour parler de cinéma.
Une scène qui m’a marqué c’est lorsque Jérémie fait une dégustation de vin à l’aveugle avec sa belle famille : on attend de lui qu’il sache très exactement quel vin il est en train de goûter, de quelle année il date.
Ça m’a beaucoup fait penser à cet aspect de la cinéphilie où l’on attend du cinéphile qu’il sache tout, sur le bout des doigts, sur tous les réalisateurs, tous les acteurs de toutes les époques…

Malheureusement cet aspect réflexif n’est pas réellement poussé : jamais explicite non plus ; très superficiel en somme.
Je pense que c’est lié au fait aussi que le film utilise quelques facilités scénaristiques : les auteurs ont voulu écrire quelque chose facilement sans trop se prendre la tête.
Par exemple ce groupe de frères et sœurs s’aime vraiment beaucoup trop : ils ne se sont pas vus depuis 10 ans et pourtant c’est comme s’ils ne s’étaient jamais vraiment quittés. Jérémie est bien agressif la première fois qu’il revoit son frère, mais très vite il redevient extrêmement tendre avec lui.

Il y a aussi une autre facilité scénaristique qui m’a révulsé au plus haut point, mais pour vous l’expliquer je vais devoir aller en détails et spoiler un peu.

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(Voilà je vais spoiler un peu: vous aurez été prévenus)

Jean avant de partir en voyage 10 ans, avait écrit une lettre à son père dans laquelle il lui disait tout ce qu’il pensait de lui, pourquoi il partait, etc…
Alors que Jean est dans les vignes à se disputer avec son frère et sa soeur, il commence à mentionner cette lettre.
Et il précise bien qu’il a toujours attendu une réponse de la part de son père, et que maintenant que ce dernier est mort de la maladie qu’il avait, il n’y en aura pas.
Sauf que : retournement de situation ; Jérémie dit avoir la lettreréponse dans le manteau qu’il porte, qui appartenait au père décédé.

Évidemment : scène larmoyante, cathartique, avec flashback et tout ce qu’il faut…

Cette scène m’a sorti du film parce qu’elle en faisait beaucoup trop et que j’avais vu venir la chose 10 minutes avant…

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(Voilà les spoilers c’est fini)

Je vais finir en parlant de la mise en scène.
Klapisch utilise beaucoup le procédé du flashback, pour rappeler l’enfance de ses personnages, et créer de l’empathie.
Beaucoup de flashbacks marchent et sont très beaux ; d’autres marchent beaucoup moins, et certains sont justes ratés…Flashbacks.gif

(Ce flashback: par exemple; c’est un oui)

D’un point de vue visuel: Il y a aussi des scènes qui se passent dans la tête de Jean : où il se parle à lui même quand il était enfant… Et là pour le coup selon moi c’est totalement raté, parce que totalement irréaliste, superficiel, ça essaie d’être émotif juste là où ça ne m’atteint pas.

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(Par exemple cette scène qui a la subtilité d’un éléphanteau)

Pourtant Klapisch sait jouer avec l’imaginaire de ses personnages (Notamment dans Les Poupées Russes).

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(Ce passage notamment: à mourir de rire)

Donc en résumé si vous êtes fan de Klapisch, si vous avez déjà vu un de ces films et que vous aimez beaucoup : foncez, vous ne serez pas dépaysé. Les personnages sont toujours aussi attachants et nuancés.
Par contre si vous cherchez de la subtilité autre part que dans les rapports humains : si vous cherchez la subtilité dans la mise en scène ou le déroulement du scénario ; passez votre chemin, ça vaudra mieux pour vous.

The Square de Ruben Östlund

Ah le festival de Cannes… Sa semaine de la critique, son circuit Hors compétition, sa sélection Un Certain Regard, qui nous livrent chaque année des films passionnants et qui ont su célébrer nos films favoris.
Mais quand je disais à ma sœur que j’allais voir la Palme d’or de cette année, elle m’a fait une remarque cinglante.
« J’ai regardé la bande annonce de The Square, j’ai rien compris. De toute façon à partir du moment où je vois le logo du festival de Cannes imposé sur un film je me barre en courant. »

À chaque fois que je parle du festival de Cannes à cette sœur elle me dit toujours que les films qui y passent sont des films d’auteurs chiants.
Je lui rétorque toujours par un systématique mais pas moins efficace « Oui mais Pulp Fiction« … (PS: Je ferai mieux de lui parler de La vie est belle en fait)

Alors qu’en réalité Pulp Fiction reste un film d’auteur, c’est juste qu’il est un peu plus rock’n’roll que ce que l’on catégorise sous la bannière du « cinéma d’auteur ».
Et les remarques de ma sœur m’ont fait réaliser quelque chose.
Il y’a deux sortes de facettes à ce festoche.

J’ai l’impression que lorsque l’ont parle du festival de Cannes les gens ordinaires et peu cinéphiles pensent aux films étrangers, faits par des auteurs clandestins qu’on oubliera dans l’année qui suit.
Et puis quand on parle du festival de Cannes à des gens un tant soit peu cinéphiles, ils ne voient plus que les grands qui sont passés par là: Tarantino, Scorcese, les Coppola, les Coen, Dolan, etc…
Quitte à occulter les films qui ne sont pas restés a posteriori dans la tête des cinéphiles.

Alors qu’en est-il de The Square ? Est-ce un film étranger un peu osef, ou est-ce que ça va être une oeuvre qui restera dans les mentalités ?

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(Durant tout le film: les gens qui créeront véritablement les différentes
œuvres ne seront pas les artistes eux mêmes.
Ici un ouvrier qui fabrique le fameux « The Square » mais aussi plus tard;
Christian dictant une lettre à un de ces subalternes)

The Square ça raconte donc l’histoire de Christian qui travaille dans un musée d’art contemporain à Stockholm. C’est un gars plutôt lâche et peureux, mégalo, hypocrite, matérialiste sur les bords… Enfin bref un bon gars en somme.
Il dirige les différentes exposition que propose le musée, et la dernière en date s’intitule The Square, un manifeste proutprout prônant l’altruisme, la bienveillance et tout un tas d’âneries de ce genre.

Ensuite il est plutôt difficile de résumer le film. Parce que son scénario est plutôt vide.

Pas dans le sens où il ne se passe jamais rien dans le film et qu’on s’ennuie, mais plutôt dans le sens où le film est très quotidien. On a parfois la sensation que c’est une série d’anecdotes qui nous sont racontés plutôt qu’une réelle histoire. En dehors du fil rouge dans le film, qui a en réalité rien à voir avec l’activité principale du personnage que nous suivons.

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(Cette scène par exemple: même s’il est plutôt marrante, elle n’impacte
en rien le reste du film)

Bon alors c’est bien beau tout ça vous allez me dire, mais je n’ai toujours pas abordé ce qu’était le film en substance: C’est quoi ? Une comédie ? Un drame ? Une satire ?

En fait c’est un peu les trois. C’est surtout une critique des milieux artistiques et intellos; qui nous montre à quel point dans cet environnement là personne ne s’écoute, et combien il est dur d’y communiquer.
Le personnage de Christian est là pour mettre en exergue tout le paradoxe de ces bourgeois. C’est lui qu’on va suivre pendant la presque totalité du film, en dehors de certaines scènes.

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(Cette scène vraiment cool où l’ont prévient les bourgeois
qu’ils feront face à une prestation qui leurs feront peur,
qui décident d’en rire, et lorsque la peur vient véritablement
ils se rebiffent. Ils demandent un divertissement et c’est ce qu’ils ont.
Ils ne s’attendaient juste pas à un tel degré de subversion.)

C’est un imposteur dès la scène d’ouverture où on lui balance à la figure des théorisations fumistes de ce qu’est l’art qu’il aurait lui même émit, mais dont il ne comprend pas un seul mot.
Il est peureux lorsqu’il est dans ce bâtiment d’un quartier populaire de Stockholm à faire du « porte à porte ».
Ce qui donne une réelle dimension satirique au film, un poil théâtrale: la satire naît du personnage de Christian. Et ça déplaira à beaucoup. Parce que ça reste vachement paradoxal.

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(La dite scène d’ouverture qui donne le ton du film)

Les gens qui vont voir le film ce sont les gens un poil intellos, qui s’intéressent au festival de Cannes et aux films étrangers. Le genre de personnes que le film critique justement.
Et il ne s’adresse pas à une démographie populaire et/ou populiste parce que ça reste un film plutôt implicite et élitiste.

Trop explicite pour les bourgeois, trop implicite pour les milieux un peu plus populaires; aller voir The Square c’est avant tout assister à un putain de numéro d’équilibriste où tout risque de se péter la gueule.

Le film a quand même fait effet sur moi. Les scènes comiques, qui reposent donc sur le manque de communication des différents personnages, sont assez grotesques pour être fendarde, sans être too much.
Et le film ne verse pas dans le cynisme absolu: le personnage de Christian n’est pas un anti-héros total, il essaie toujours de bien faire au fond. Même s’il fait des énormes bourdes tout le long du film.
Il est anti-héros malgré lui, c’est l’aliénation de son travail et surtout de son milieu qui l’ont rendu comme ça.

C’est un film comique au premier degré, à la limite d’une pièce de théâtre classique, optimiste, énonçant et dénonçant les dérives de la bourgeoisie.

Quant à la question de savoir si le film résistera à la postérité…
Ça dépendra de la carrière future de Ruben Östlund. S’il continue à marquer les esprits comme il l’a fait, son passage à Cannes sera l’équivalent du passage d’un Coppola avec son Conversation Secrète.

Parce qu’il ne s’agit pas ici d’un chef d’oeuvre, d’une pièce maîtresse et indépendante de la filmographie de son auteur.
Il s’agit d’un bel ouvrage qui n’aura de sens qu’en étant retenu dans la globalité de ce qu’aura fait Ruben Östlund.

Dunkerque de Christopher Nolan

Tout le monde semble se mettre d’accord pour dire que Christopher Nolan est un génie (enfin presque tout le monde).
Pour ma part je dirai ceci: le monsieur est fortiche. Genre vraiment fortiche.
Je vais prendre en exemple un de ses films les plus acclamés: Memento.
On ne peut pas être indifférent à une telle recherche du scénario; nécessairement on est impressionné par la manipulation dans laquelle Nolan nous emporte.
Dunkerque c’est un peu la même chose: on est obligé d’être impressionné par la maîtrise technique.

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(Aller: parlons du film un peu)

Si Interstellar se rapprochait plus d’un film de Spielberg dans le mesure où on a beaucoup d’empathie pour les personnages, qu’on est embarqué dans une grande aventure; ici avec Dunkerque Nolan se rapproche plus de certains films de Kubrick.
Dunkerque attache peu d’empathie aux personnages: d’ailleurs les noms des personnages sont quasi jamais mentionnés.

Nolan va chercher dans le sensoriel et le viscéral, il essaie de nous faire sentir ce que ça a été de faire partie de cette masse de soldats coincés.
Cette volonté de créer un film sensoriel c’est un pari risqué.
Au départ je me disais que dans un film de guerre il fallait montrer les individus, ce qu’ils vivaient: parce que c’était là que résidait le véritable drame de la guerre. La destruction généralisée des individus.

Mais pour moi le pari est rempli: j’ai été emporté dans le film et sa réalisation.

Chaque aspect du film veut nous mettre en alerte, essaie de nous mettre dans le même état de stress que les soldats qu’il montre.
La musique: bien sûr, exemple évident que beaucoup de personnes ont abordé, avec le tic-tac incessant.
Le montage qui alterne des scènes très rapidement, et qui ralentit aussi par moment.
Mais c’est surtout le scénario qui plonge dans cet état de stress: La façon de découper l’histoire en 3 parties et en 3 temporalités différentes.
Couper l’histoire en 3 permet de montrer toujours quelque chose d’intéressant au spectateur: il se passe toujours quelque chose à l’écran, et il n’y a que de très rares moments de flottements dans le film.
Puis couper l’histoire en 3 permet surtout à Nolan de faire la démonstration de ce qu’est une guerre totale: à pieds, dans les airs, sur la mer; que ce soit soldats ou civils.
Mais la temporalité est l’élément le plus fort selon moi: au début on est confus (comme les soldats) on ne sait pas l’ordre des évènements, les scènes sont montées dans un ordre a-chronologique alors on est perdu.

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(Regarde les hommes le premier film de Jacques Audiard a une temporalité semblable: des intrigues parallèles qui finissent par se rejoindre)

Finalement quand on comprend comment le film marche: on ne l’apprécie que d’autant plus.

Dunkerque c’est un film troublant et réaliste avec une production vraiment incroyable. Tout force le respect dans ce film; le nombre de figurants, la photo, le scénario, les acteurs, le travail de recherche, la fidélité historique, le réalisme…
Enfin bref un grand oui pour ma part.

Qu’est-ce que t’as branlé Maurice ? (Ou ce que j’ai fait ce mois-ci)

Non je n’ai pas lâché le site, j’étais en « vacances ».
Enfin je suis en vacances depuis Juin, mais ce que je veux dire c’est que je me suis octroyé du vrai temps libre pendant quelques temps.
J’ai levé le pied, j’ai ralenti mon visionnage de film, je suis sorti avec des amis, j’ai fait du tourisme aussi: bref j’ai fait des vraies vacances quoi.
Depuis la dernière critique qui date d’il y’a un mois, je n’ai vu que 8 films, j’ai regardé un peu de séries, mais j’ai surtout SURTOUT, beaucoup joué à un jeu vidéo.
Donc: préparez vous à mon compte rendu culturel des vacances, sur un film, une série et le jeu auquel j’ai beaucoup joué.

Au revoir les enfants de Louis Malle

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Au revoir les enfants c’est un film extrêmement autobiographique. Je déteste l’expression « devoir de mémoire », mais là c’est vraiment l’exercice que Malle a effectué sur le film.
Il s’est efforcé de retranscrire son enfance: pas seulement dans la partie la plus spectaculaire et cinématographique (La dissimulation des enfants juifs), mais aussi dans l’anecdote (le frère qui fait fumer, le fonctionnement du marché noir) et surtout dans le détail et la confidence (Le pipi au lit du héros principal… Je pense que ça doit être autobiographique, j’espère que c’est autobiographique).

How I Met Your Mother Saison 1

How-I-Met-Your-Mother.jpgPour le coup j’en sors tout juste d’hier. C’est un re-visionnage de la série que je fait, et pour l’instant je la mange toute crue.
En re-regardant cette série j’ai réalisé quelque chose: la puissance des personnages dans le média de la série.
Je savais déjà que les personnages étaient la colonne vertébrale d’une série mais parce que je ne regarde pas tant de série que ça, j’avais vraiment du mal à me rendre compte qu’un film d’une heure trente est beaucoup moins approprié pour créer de l’attachement à des personnages qu’un métrage qui se déroule sur plusieurs dizaines d’heures.

Et évidemment la série est drôle, touchante par moments, on est réellement investi dans le groupe de potes et savoir certaines choses qui se passent à l’avance rend les situations plus drôles quand elles se veulent comiques et encore plus tragique quand elles se veulent dramatiques.

The Witcher 3: Wild Hunt et ses extensions de CD Project Red

Voilà où j’étais passé ce dernier mois. J’étais coincé dans l’univers de ce jeu. J’y suis toujours un peu d’ailleurs: la profondeur de l’histoire, de l’univers, des personnages et des situations m’ont totalement emporté.
J’ai passé plus de 100 heures ce mois-ci sur le jeu et ses deux extensions et je ne regrette absolument rien, le voyage valait très clairement le coup.

Je me suis senti investi dans la quête de Geralt à trouver Ciri: je me suis souvent surpris pendant les dialogues à répondre à voix haute aux autres personnages, et souvent Geralt disait exactement ce qui venait de sortir de ma bouche.

(Et la musique joue beaucoup dans l’immersion du jeu aussi…)

Certains passages dans la mise en scène sont plutôt impressionnant (surtout à la fin), souvent le jeu dans ses cinématiques a le même élan qu’un film dans ses cadrages et ses dialogues.

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(Un exemple de plan plutôt bien fichu dans l’extension Heart of Stone)

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(Ce moment de l’aventure possède une justesse dans tous ses aspects: je n’avais jamais vu ça dans un jeu vidéo)

Le jeu est plutôt répétitif, a quelques problèmes de Game Design, des bugs, et autres défauts.
Mais pour l’instant je n’ai jamais été aussi immergé dans un jeu qu’avec celui là.
Ce jeu me redonne envie de jouer aux jeux vidéos, et me donne espoir pour le futur de l’industrie.

Wonder Woman de Patty Jenkins

Alors voilà :

C’est ma première (vraie) critique. Ça fait bizarre; j’ai beaucoup de choses à dire sur les films et il m’a fallu longtemps pour en arriver là.
Si je n’ai pas écrit plus tôt c’est que je me demandais si j’allais être pertinent et légitime, dans mes propos.

Aujourd’hui je ne me pose plus ces questions.
J’ai réalisé que dans l’exercice de la critique il suffit d’être constructif, d’à peu près bien écrire et surtout d’être respectueux envers le film (aussi mauvais soit-il) pour faire un bon texte.

Et puis tout le monde le fait. Alors pourquoi pas moi.

Le challenge sera donc de vous parler du mieux que je peux d’un film une fois par semaine. Je ne vais pas essayer d’établir de vérités absolues dans mon travail: pour moi ça n’a pas de sens. Les films sont beaucoup trop sujets à notre subjectivité, notre vécu, état de pensée, et bagage culturel.

L’appréciation d’un film change tellement d’une personne à l’autre, que je n’ai pas prétention d’avoir une vision supérieure aux autres.
Loin de là: je pense même que beaucoup font un meilleur travail que tout ce que je ne pourrai jamais faire.

Donc ceci est ma première critique, et elle sera (je pense) encore plus subjective que celles qui suivront parce que j‘étais extrêmement fatigué en allant voir le Wonder Woman de Patty Jenkins: je n’avais pas dormi depuis plus de vingt-quatre heures

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(Rentrons donc dans le vif du sujet)

Après une scène d’introduction pour le moins inutile (j’y reviendrai plus tard), le film montre l‘enfance du personnage principal: Diana.
Au gré de ses espiègleries, l’enfant se baladait sur une île paradisiaque, champêtre.

Et je ne sais pas exactement pourquoi: le décor, la musique, le peuple des Amazones à mi-chemin entre esthètes et guerrières, ou le personnage de l’enfant si libre: mais ces quelques premières minutes de film, m’ont atteint, j’étais admiratif et j’ai failli pleurer (Une grosse partie de fatigue sans doute).

Mais à peine quelques secondes plus tard, j’étais sorti du film violemment: Diana se mit à sauter dans le vide.
Le saut est intégralement montré par de l’image de synthèse assez criarde.

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(Un saut à peu près comme ça…)

Le film depuis ses premières minutes, jouait la carte du vrai: il impressionnait par ce qui était factuellement sur l’écran. Alors quand l’image de synthèse est arrivée, cette admiration que j’avais eue jusque là fut rompue.

Et ceci résume parfaitement le problème que l’imagerie du film comporte:
En dehors des grosses scènes d’action qui ont besoin du numérique, et qui sont vraiment jouissantes parce qu’elles donnent une sensation de puissance; la surenchère d’effets spéciaux à des moments plus intimistes m’ont sorti du film.

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(Ça: c’est oui)

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(Ça: c’est non, le plan manque de réalisme…)

Le film brille dans les moments où il nous montre du vrai: quand les personnages font face à des problèmes humains.
J’aurai aimé voir un film qui aurait pris le personnage super-héroïque et idéaliste, et qui l’aurait mis face à de vrais problèmes: aux vraies horreurs de la seconde guerre mondiale.

Le film tente à certains moments de faire cela mais ne touche jamais vraiment cette thématique.

Bref. Le film s’empêtre dans une structure narrative ultra-classique en trois actes, et il ne fait qu’effleurer les thématiques qui sont intéressantes.
Wonder Woman pose les questions suivantes dans certaines de ses scènes: « Les hommes sont ils mauvais par nature, ou pousse-t-on les hommes à être mauvais ? » « Serons-nous toujours obligés de faire la guerre ? », mais n’y répond jamais.
Il n’offre aucune piste de réflexion non plus.

Ce qui aurait été génial c’est de faire un blockbuster, avec une super héroïne, et qui soit anti-guerre.
Mais le film ne prend pas le temps de poser ses personnages pour discuter de ces problèmes.
Parce que sa structure ne le permet pas. L’écriture du film est nécessaire: on respecte la formule en 3 actes (Situation initiale, élément perturbateur, point de non-retour, péripéties, élément de résolution, et conclusion) et on ne va pas plus loin; parce qu’il faut que le film avance.
Le film n’a pas le temps.

D’ailleurs l’exposition du premier acte le montre parfaitement: elle fait extrêmement forcée, tant par la façon dont elle est amenée scénaristiquement, que par sa mise en scène (Une séquence d’animation très anecdotique).
Et quand le grand méchant arrive comme un cheveux sur la soupe au début du troisième acte: on a cette sensation que les scénaristes font venir ce personnage plus par nécessité de terminer le film que par envie de donner un vrai propos.
Pareil avec l’intérêt amoureux de Diana: elle le connaît à peine, et elle tombe dans ses bras en deux jours, alors qu’il est établi depuis le début que l’héroïne est forte et indépendante. On a l’impression qu’on a forcé les scénaristes à intégrer une intrigue amoureuse.

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(Sérieusement, cette scène est une honte)

En conclusion le film fait très superficiel: dès le début, avec sa scène d’introduction inutile à Paris, qui ne sert ni à dégager un propos, ni à créer quelque chose de fort narrativement. Le film est raconté en flashback mais, très franchement ça n’impacte en rien ce que le film raconte.

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(Ces scènes à Paris aussi sont honteuses)

Et le film se conclue aussi à Paris; avec un dernier plan superficiel, cliché et bourré d’images de synthèse.
Pourtant le film ne manque pas de panache lorsqu’il s’agit de filmer certaines scènes spectaculaires, et dans certains moments il a un vrai souffle (Le début où j’ai failli pleurer, entre autre).

Le film aurait gagné à avoir une production plus longue: un scénario retravaillé pour faire une structure beaucoup plus étoffée et des effets spéciaux aboutis.

Je pense qu’on n’est pas à l’abri d’une version longue qui sortira dans quelques mois, avec certaines retouches visuelles; en plus de nouvelles scènes…